La Psychothérapie Institutionnelle


2ème partie - De Saint-Alban au Groupe de Sèvres

 

1) L'hôpital psychiatrique de Saint-Alban.

L'hôpital psychiatrique de Saint-Alban se situe en Lozère. L'expérience de Saint-Alban, pendant la seconde guerre mondiale fut prépondérente dans la création du mouvement de la psychothérapie institutionnelle.

Face aux restrictions alimentaires, le personnel, les médecins et les malades organisent l'approvisionnement en aliment avec la complicité de la population.

Lorsque P. Balvet, psychiatre catholique arriva à Saint-Alban, en 1936, il effectua des réformes afin d'humaniser l'asile. Il est remplacé, en 1942, à la direction de l'hôpital par Lucien Bonnafé, psychiatre communiste.

A Saint-Alban, se retrouvèrent des résistants, des fous, des thérapeutes et des intellectuels de passage parmi lesquels le philosophe Georges Canguihem (1904-1995) et le poète Paul Eluard (1895-1952). L'équipe de l'hôpital se mit à réfléchir, dans cette période troublée, aux principes d'une psychiatrie communautaire qui permettrait de transformer les relations entre les soignants et les aliénés dans le sens d'une plus grande ouverture au monde de la folie.

L'arrivée de François Tosquelles (1912-1994) en 1941, psychiatre catalan contraint de fuir l'Espagne après la victoire de Franco, donnera les fondements à cette nouvelle praxis. De formation psychanalytique, il apporte avec lui deux ouvrages qui lui serviront de référence:

1) Le livre d'Hermann Simon sur l'expérience de Guttersloch.

2) la thèse de Jacques Lacan sur la personnalité paranoïaque.

A Hermann Simon, il emprunte l'idée qu'il faut à la fois soigner l'établissement et soigner chaque malade, en lui rendant initiative et responsabilité, en développant les situations de travail et de créativité.

A Jacques Lacan, il emprunte la démarche de compréhension de la psychose qui s'appuie sur les découvertes freudiennes. Le discours du psychotique a un sens. Jean Ayme, dans son Essai sur l'Histoire de la Psychothérapie Institutionnelle, précise qu'il est aussi nécessaire de" se doter de moyens de lecture et de lieux pour dire".

François Tosquelles devient, en 1952, le médecin directeur de Saint-Alban.

François Tosquelles, Paul Bavet, André Chaurand et Lucien Bonnafé créent la "Société du Gévaudan" et retravaillent ensemble les bases théoriques et pratiques du champ psychiatrique et fondent celles d'une pratique inédite de la psychiatrie, dans laquelle "soins, recherche et formation" sont intégrés dans une démarche collective.

2) La Clinique de La Borde (Cour-Cheverny).

L'expérience de Saint-Alban fait école. Plusieurs internes font le choix de ce lieu de formation ou décident de suivre cette recherche : Jean Ayme, Robert Millon, Jean Oury, Franz Fanon, Maurice Despinoy, Claude Poncin, Roger Gentis, Horrace Torrubia, René Bidault, Jean Colmin.

En 1951, Jean Oury ouvre au Chateau de La Borde, près de Blois, la Clinique de La Borde ( Cour-Cheverny). Il sera rejoint par Félix Guattari.

Ginette Michaud et Jean-Claude Pollack relatent l'histoire de cette création dans "La Borde...un pari nécessaire. De la notion d'institution à la psychothérapie institutionnelle" (Gauthier-Villars, 1977).

Liens vers: La Clinique de La Borde

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3) De Fleury-les Aubrais à Maison-Blanche.

Depuis 1936, Georges Daumezon, à l'hôpital de Fleury-les-Aubrais, près d'Orléans, dénonce le caractère aliénant de l'hôpital psychiatrique. Il y introduit de multiples activités distractives, culturelles, sportives auxquelles participe tout le personnel, y compris le personnel administratif et technique. Il crée des réunions de pavillon, où sont notamment débattus les conflits et problèmes liés à la vie du pavillon.

Nommé en région parisienne, il poursuivra cette démarche désaliéniste à Maison-Blanche avec la collaboration de deux internes : Philippe Paumelle et Philippe Koechlin.

C'est en 1952 que Daumezon et Koechlin introduisent pour la première fois l'expression "Psychothérapie Institutionnelle".

Daumezon attachera toujours une très grande importance au rôle de l'infirmier dans cette "nouvelle stratégie thérapeutique". Il crèe en 1949 des stages de formation dans le cadre des Centres d'Entrainement aux Méthodes d'Education Active (CEMEA).

4) Le Groupe de Sèvres.

En 1957-1958, plusieurs réunions ont lieu à l'initiative de Georges Daumezon : à l'intérieur du Groupe de Sèvres, on discute des théories du secteur en psychiatrie et de la participation des infirmiers à la psychothérapie. Le Groupe de Sèvres fonctionnera pendant deux ans. Sa disparition, en partie liée aux désaccords sur la participation des infirmiers à la psychothérapie, marque un tournant. Entre 1960 et 1970, une nouvelle période s'ouvre , période de dispersion riche de réalisations mais aussi de divergences portant sur la primauté du politique ou du psychanalytique ...sur le transfert dans la psychose, sur le rôle de la psychanalyse dans la vie quotidienne ... Ces divergences donnent naissance à divers courants, ne se réclamant pas tous de la "psychothérapie institutionnelle".

G.Courant / juin 2003

Eléments d'une histoire (1ère partie) : De Pinel à Hermann Simon

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